I bummed the last smoke I ever had from Jannis Kounellis. It was in Italy in 2014. Together with our artist group, L’Alfabeto, we were trying to familiarize ourselves with the place in preparation for our exhibition in the antique Roman cistern of the Villa Medici in Rome. That trip to Italy made me confront my profound lack of comprehension of that landscape. We decided to call the exhibition L’Analfabeto. I often vent through humour. That last smoke was in front of the restaurant at the end of the stay—I hadn’t uttered a word to Kounellis throughout. When I asked him for the cigarette he couldn’t really place my accent. Later that night, Bernhard Rüdiger asked Kounellis if he ever met Giorgio di Chirico. Yes, I was young, his Greek was very good, I was embarrassed. The night before the opening, a moth had left traces with its antennae on the glass hendecahedron, which I had coated with soot from a candle. The impossibility of putting ourselves in the insect’s place opens up a void to our perception. Ever since then, I carry that void in my worldview.
Ma dernière clope, je l’ai grattée à Jannis Kounellis. C’était en 2014 en Italie. Avec notre groupe d’artistes, L’Alfabeto, on faisait nos repérages pour notre exposition dans l’antique citerne romaine de la Villa Médicis à Rome. Ce voyage en Italie m’a mis face à ma profonde incompréhension de ce paysage. On a décidé d’appeler l’exposition L’Analfabeto. J’évacue souvent par l’humour. Cette dernière clope, c’était devant le resto en fin de séjour — j’avais pas décroché un mot à Kounellis tout le long. Quand je lui ai réclamé une cigarette il ne comprenait pas bien d’où je venais avec mon accent. Plus tard dans la soirée, Bernhard Rüdiger lui a demandé si il avait jamais rencontré Giorgio de Chirico. Oui, j’étais jeune, il parlait très bien le grec, j’étais embarrassé. Le soir avant le vernissage, un papillon de nuit est venu laisser des traces d’antennes dans mon endécaèdre de verre noirci à la suie de bougie. L’impossibilité de se mettre à la place de l’insecte ouvre un vide à notre perception. Depuis, je porte ce vide dans ma représentation du monde.
L’Analfabeto 15.04.2014–17.05.2014 Exhibition by L’Alfabeto in partnership with l’École nationale supérieure des beaux-arts de Lyon et l’Académie de France à Rome — Villa Medici.
The Académie de France in Rome — Villa Medici presented the group exhibition L’Analfabeto, in the Cistern of the Villa Medici from April 15 to May 17. Conceived by the artists of L’Alfabeto, the exhibition brings together Yann Annicchiarico, Axelle Bonnard, Jenny Feal Gomez, Karolina Krasouli and Anaëlle Vanel, with the participation of Elise Cam, Ovidiu Leuce, Alfredo Pirri and Bernhard Rüdiger, and the artworks of Francisco Tropa.
L’Alfabeto is a research project organized by five young, international artists who studied at the École nationale supérieure des beaux-arts in Lyon. Inspired by the title of the first series of works by Jannis Kounellis, L’Alfabeto evokes the necessity of transmission, understood here as the migration of forms and ideas, both geographical and generational. This starting point gave rise to a seminar project held at the Villa Medici in July 2014. In partnership with the Ensba in Lyon, the Académie de France in Rome hosted the seminar “L’Alfabeto” and the exhibition L’Analfabeto as part of its plan to perpetuate a strong link with artistic transmission, and to support the emergence of new generations of artists.
After visits to Matera on the trail of Pier Paolo Pasolini, and to the archaeological sites of the Bronze-Age Italiot people, the notion of anchoring emerged as central to our concerns. Anchoring is defined here as the permanence of the past within the present. Interactions with artists Jannis Kounellis and Francisco Tropa during this seminar enriched our research and opened up this shared experience to form an exhibition. While seeking to define the idea of anchoring and common language, an obvious fact emerged: ignorance. Like an induced force, it pushes us to continue to search where we no longer understand. Culture is what belongs to the illiterate person. Aware of language but freed from its filter, he or she establishes a personal relationship with History. The illiterate person updates forms of thought through creation. This renewed proximity is perhaps the only way for us to continue dancing.
In the midst of these misunderstandings, L’Analfabeto emerged from the desire to rewrite our language. Formerly a water reservoir, the Cistern of the Villa Medici now houses L’Analfabeto. The unusual architecture of this place retains the traces of its basic, vital function. It will be a place of exploration of underground narratives, and the emergence of elementary forms, as if calling upon a deep and primal memory. This amazing place becomes the common ground for an encounter with the present time. In an illiterate way, the exhibition constructs what the past leaves us in terms of traces and absence of traces; it shows the present. Following the opening, a discussion between the artists of L’Alfabeto and Italian artists of the same generation will take place at the Fondazione per l’Arte, a new exhibition space in Rome which supports young Italian and international artists.
L’Analfabeto 15.04.2014–17.05.2014 Exposition réalisée par L’Alfabeto en partenariat avec l’École nationale supérieure des beauxarts de Lyon et l’Académie de France à Rome — Villa Médicis.
L’Académie de France à Rome — Villa Médicis a présenté, du 15 avril au 17 mai, dans la citerne de la Villa Médicis, l’exposition collective L’Analfabeto. Conçue par les artistes de L’Alfabeto, l’exposition réunit Yann Annicchiarico, Axelle Bonnard, Jenny Feal Gomez, Karolina Krasouli et Anaëlle Vanel, avec la participation d’Elise Cam, Ovidiu Leuce, Alfredo Pirri et Bernhard Rüdiger et les oeuvres de Francisco Tropa.
L’Alfabeto est un projet de recherche organisé par cinq jeunes artistes internationaux ayant étudié à l’École nationale supérieure des beaux-arts de Lyon. Inspiré du titre de la première série d’œuvres de Jannis Kounellis, L’Alfabeto évoque la nécessité de la transmission, entendue comme migration des formes et des idées, géographique et générationnelle. Ce point de départ a donné naissance à un projet de séminaire qui s’est tenu à la Villa Médicis en juillet 2014. En partenariat avec l’Ensba de Lyon, l’Académie de France à Rome accueille le séminaire « L’Alfabeto » et l’exposition L’Analfabeto dans le cadre de son projet de pérennisation d’un lien fort avec la transmission artistique et l’accompagnement de l’émergence de nouvelles générations d’artistes.
Après une visite à Matera à la recherche des traces de Pier Paolo Pasolini, et la visite de sites archéologiques des peuples Italiotes de l’Âge de bronze, la notion d’ancrage s’est trouvée au centre de nos préoccupations. L’ancrage se définit comme la permanence du passé dans le présent. Des échanges avec les artistes Jannis Kounellis et Francisco Tropa pendant ce séminaire ont nourri nos recherches, et ouvert ce partage d’expérience vers une forme d’exposition.
En cherchant à définir l’idée d’ancrage et de langage commun, une évidence est apparue : l’ignorance. Comme une force induite, elle pousse à continuer à chercher là où l’on ne comprend plus. La culture est ce qui appartient à l’analphabète. Conscient du langage mais libéré de son filtre, il établit une relation personnelle à l’histoire. L’analphabète remet à jour les formes de la pensée par la création. Cette proximité renouvelée est peut-être la seule façon de continuer à danser.
Au milieu de ces incompréhensions, L’Analfabeto est née de la volonté de réécrire notre langage. Ancienne réserve d’eau, la citerne de la Villa Médicis accueille L’Analfabeto. L’architecture inhabituelle de ce lieu garde les traces de sa fonction élémentaire et vitale. Elle sera le lieu d’exploration de narrations souterraines et de l’émergence de formes élémentaires, comme faisant appel à une mémoire profonde et primaire. Ce lieu étonnant devient le terreau commun à une rencontre avec le temps présent. L’exposition construit d’une façon illettrée ce que le passé nous laisse comme traces et non-traces, elle donne à voir le présent. Suite au vernissage, une discussion réunissant les artistes de L’Alfabeto et des artistes italiens de la même génération a eu lieu à la Fondazione per l’Arte, nouveau lieu d’exposition à Rome qui soutient les jeunes artistes italiens et internationaux.